samedi 14 septembre 2019

Roland Jaccard est dans La Cause Littéraire





« S’il est vrai que John Wayne a tourné dans quatre-vingt-trois westerns, c’est bien l’homme à abattre. D’autant que, comme l’affirment certains béotiens, quand on en a vu un, on les a tous vus. Face à ce gendre d’abrutis, la Winchester 54 peut être du plus grand secours ».
 
John Wayne n’est pas mort et Roland Jaccard est toujours de ce monde. Plus vivant que jamais, d’une rare agilité, n’ayant peur de rien, n’en déplaise à ceux qui prendraient un rare plaisir à aller cracher sur sa tombe. Roland Jaccard est un cinéphile à l’ancienne, on l’imagine mal lisant chaque mois Les Cahiers du Cinéma, préférant peut-être Positif. L’ami de Cioran, le lecteur d’Amiel, l’oisif, l’exilé intérieur, l’amateur de palaces et de jeunes femmes, s’arme ici d’une plume aiguisée comme une flèche Comanche pour défendre John Wayne. L’acteur et réalisateur de Alamo et des Bérets Verts est accusé de mille maux par mille mots, et Roland Jaccard règle leur compte à quelques fâcheux peu instruits de ce que ce genre a apporté à l’histoire du cinématographe américain. Roland Jaccard n’est pas seul, il avance accompagné, c’est toujours conseillé en territoire hostile : le pétillant cinéaste Luc Moullet (1), le savoureux écrivain Luc Chomarat (2), quelques amies, Clément Rosset, s’échauffant après quelques verres de saké, et Louise Brooks :
En fait, John Wayne correspondait à la définition que Henry James a donnée de la plus grande des œuvres d’art : un être parfaitement beau.
 
 
 
« Tous ceux, pourtant, qui ont connu John Wayne, même les plus opposés à ses idées politiques, ont été forcés d’admettre qu’il n’était pas le sectaire décrit par la presse. Ils étaient au contraire surpris par sa bonne humeur, son éloquence, son talent de joueur d’échecs et sa profonde connaissance de l’art, de l’histoire et de la littérature ».
 
 
 
 




 
John Wayne est l’homme à abattre, trop à droite, réactionnaire, trop viril, trop américain finalement, trop proche de l’US Army, raciste disent-ils, les insultes fusent, et très vite s’effondrent, confrontées aux faits. John Wayne est au bout du compte trop bon comédien et Roland Jaccard plus que jamais pétillant et piquant. Dès qu’il apparaît dans un western, c’est un mythe qui se met à galoper, à tirer au Colt 45 ou la Winchester 54, à embrasser du regard un désert, des montagnes, des rivières sauvages, à croiser le regard d’indiens et de bandits pilleurs de banques et embrasser celui de Maureen O’Hara.
 
John Wayne incarne l’Amérique, les Amériques des Chevauchées fantastiques, du désert et de sa Prisonnière, l’or du cinéma d’Hollywood, façonné par son ami John Ford, le « big boss », et Roland Jaccard lui rend là un bel hommage à poings fermés, hommage au Dernier des géants.
 
« Il a soixante-dix ans. Il rédige son testament, dans lequel il demande qu’on inscrive sur sa tombe ces simples mots : « Feo, fuerte y formal », ce qui signifie : « Pas beau, mais fort et digne ».
 
 Philippe Chauché
 
(1) Brigitte et BrigitteAnatomie d’un rapportGenèse d’un repasLes Naufragés de la D17.
(2) Les dix meilleurs films de tous les temps (Matest Editeur). On lui doit également L’Espion qui venait du livre (Rivages Noir) ou encore Le Polar de l’été (La Manufacture de livres).


https://www.lacauselitteraire.fr/john-wayne-n-est-pas-mort-roland-jaccard-par-philippe-chauche

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