" Cela faisait des siècles qu’on ne crachait plus quand passait un écrivain. "
"Avant la création du monde, le dernier couple d’humains sera chassé du jardin de l’hôpital. "
" Il y a des gens qui en veulent toute leur vie à un mendiant de ne rien lui avoir donné. "
" Proposition pour regagner cette ville : modification du dialecte et interdiction de la reproduction.
Karl Kraus écrit à Vienne, entre deux catastrophes annoncées, la fin de l’empire austro-hongrois des Habsbourg et l’avènement du national-socialisme allemand. Il ne cesse dans son journal Die Fackel de mettre en garde ses lecteurs contre la ruine qui s’annonce. Karl Kraus est en guerre, en guerre permanente contre la langue frelatée des journalistes, contre la bourgeoisie, le mensonge, la corruption, et la manipulation des masses, mais aussi les complaisances douteuses et les dénis de justice. Il manie la satire et l’attaque directe, la visée frontale, c’est un snipper, la plume et la parole, car il se pique également d’organiser des soirées de lectures publiques qui connaissent de grands succès – ce que j’écris est du théâtre écrit.
Karl Kraus écrit à Vienne, entre deux catastrophes annoncées, la fin de l’empire austro-hongrois des Habsbourg et l’avènement du national-socialisme allemand. Il ne cesse dans son journal Die Fackel de mettre en garde ses lecteurs contre la ruine qui s’annonce. Karl Kraus est en guerre, en guerre permanente contre la langue frelatée des journalistes, contre la bourgeoisie, le mensonge, la corruption, et la manipulation des masses, mais aussi les complaisances douteuses et les dénis de justice. Il manie la satire et l’attaque directe, la visée frontale, c’est un snipper, la plume et la parole, car il se pique également d’organiser des soirées de lectures publiques qui connaissent de grands succès – ce que j’écris est du théâtre écrit.
" Ils ont la presse, ils ont la Bourse, maintenant ils ont aussi le subconscient ! "
" Les barbiers de village ont une pomme qu’ils fourrent dans la bouche des paysans avant de passer le rasoir. "
" Les journaux, eux, ont le feuilleton. "
" Le nigaud qui parle d’art trouve immodeste l’artiste qui en parle. "
" L’escroquerie escroquée, telle est la dernière pitrerie inventée par une culture déréglée. "
Karl Kraus, profondément conservateur – il coexiste chez Kraus un conservatisme étroit et un esprit iconoclaste, brillant, radical et irréductible (1) – va en 1918 soutenir la coalition des sociaux démocrates et des chrétiens-sociaux, avant de s’en écarter, ce qui lui vaudra là encore de renforcer le camp de ses ennemis – il est toujours plus simple de compter ses amis. Au cœur du volcan politique autrichien, il poursuit sans relâche la publication de son journal. Acte politique et social, mais aussi acte d’écrivain convaincu de la nécessité de défendre la langue les armes – du langage – à la main – qui peut douter que les dérèglements de la langue n’annoncent pas ceux du monde. Au centre tellurique viennois, Karl Kraus écrit, lit, écoute et regarde, et sa revue ne passe pas inaperçue. Il est lu par Robert Musil – une même génération et un même silence de l’un pour l’autre et de l’autre envers le premier –, Elias Canetti – qui lui rend hommage lors de son discours de réception de son Prix Nobel de Littérature en 1981 et qui va préfacer La littérature démolie (2) – ou encore Wittgenstein. Ses relations ne seront jamais de tout repos. Il ne ménage pas ses attaques – en voisin – contre la psychanalyse, le sionisme de Theodor Herzl – haine de soi diront certains observateurs –, les femmes, du moins certaines – le carnaval tragique de la femme qui essaie de prendre la place de l’homme ou de se mettre à son niveau (1) –, le nazisme – la langue arbitre tout – en ce qui me concerne, je n’ai aucune idée sur Hitler (3), sa ville –Vienne a de beaux environs où Beethoven allait souvent se réfugier –, les architectes, les journalistes –ils écrivent parce qu’ils n’ont rien à dire et ont quelque chose à dire parce qu’ils écrivent.
" Le diable est bien optimiste s’il croit pouvoir rendre les hommes encore plus mauvais. "
" Un gourmet me disait qu’en regard de la crème de la société il préférait la lie de l’humanité."
Karl Kraus mine la société qui défile sous ses yeux – sur le mur aveugle de mon bureau –, porte l’arme aiguisée de sa plume dans la plaie des lâchetés, des renoncements, de la modernité en marche – Le déclin moderne du monde s’accomplira quand la perfection des machines révélera l’incapacité à fonctionner des hommes – et des multiples renoncements. Ne jamais baisser la garde, voilà ce que pourrait être sa devise.
Philippe Chauché
(1) Pierre Deshusses qui a traduit et préfacé Pro domo et mundo
(2) Rivages
(3) Troisième nuit de Walpurgis, Agone
http://www.lacauselitteraire.fr/pro-domo-et-mundo-aphorismes-et-reflexions-ii-karl-kraus
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