mardi 22 février 2011

L'Arc et la Flèche (2)



" Elle vint, faisant un effort sur elle-même, et ayant mis devant elle tout son accoutrement d'homme, je l'ai fait commencer par se déchausser, mettre de bas blancs et souliers qui lui allaient mieux. Je me suis assis devant elle en lui disant qu'elle pécherait mortellement si elle me soupçonnait des intentions moins qu'honnêtes, car pouvant être son père, il n'était pas possible que j'en eusse. Elle me répondit qu'elle était bonne chrétienne, mais pas une sotte. Je lui ai tiré moi-même les bas, et lui ai mis des jarretières en lui disant que je n'aurais jamais cru qu'elle eût la jambe si belle, ni la peau si blanche, et elle rit. Flattée par mon éloge, elle n'osa pas s'opposer à la raison que j'ai voulu avoir de louer ses cuisses, que cependant je n'ai pas voulu toucher, ce qui l'édifia. Le fait est qu'elles étaient belles et magnifiques. J'ai vu comme tant d'autre fois que sublata lucerna nullum discrimen inter feminas ( quand la lampe est éteinte, toutes les femmes sont égales ). Proverbe vrai pour ce qui regarde l'amour. L'aimant de l'âme gît sur la figure ; ce peut être une forte preuve que l'homme a une âme tout à fait différente de celle des bêtes. (1)

Casanova écrivain, Casanova amant, plus vivant que jamais, ce qu'un certain Fellini n'a pas voulu voir, ou plus précisément ce qu'il a bien vu, mais qu'il a délibérément décidé de souiller de ces pauvres et laides images ; trop dangereux le vénitien, trop libre.
Mais le Temps fait toujours justice aux écrivains : on lit toujours Histoire de ma vie, quant au film : Taxi ! comme le disait non sans humour un écrivain bordelais.
Plus que jamais se vérifie cette maxime : qui sait lire, sait aimer et inversement.



à suivre

Philippe Chauché

(1) Histoire de ma vie / Volume 11 - Chapitre 1 / Jacques Casanova de Seingalt / Robert Laffont /

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