Au siècle dernier, un écrivain de fort mauvaise réputation publiait sa passion Holiday, son éblouissement pour l'une des voix les plus troublantes de la musique noire américaine, du jazz pour être précis, Billie dans tous ses états, et la littérature de Nabe - le Zannini de la guitare - plongée comme toujours dans le vitriol - ceux qui ont lu Au régal des vermines en savent quelque chose. Après il y a eu Je suis mort, Visage de turc en pleurs, Oui - Non, et Alain Zannini, et puis des éclats ici et là sur le petit écran - qui n'en demande pas tant - des tracts, un peu de fureur, une dose de mauvaise foie, une auto-édition, une disparition programmée, un programme célinien en quelque sorte. Reste les livres, ses livres - ceux cités ici - qui méritent une paisible attention, un délassement d'été, l'opposé de l'agitation littéraire qui nous prive de sieste, Nabe est un écrivain de la sieste, à partager ou pas, cela dépend du mercure.
L'âme de Billie Holiday, disponible après quelques années de spéculation sur l'édition originale, qu'il ne montre qu'à quelques amateurs de vins délictueux, livre noir, livre nègre, livre jazz, tranchant comme la trompette Lee Morgan, éblouissant comme les harmonies soyeusement décalées du piano de Lennie Tristano, joyeux comme le scat des Double Six, d'une grâce fragile et déséquilibré comme les chansons de Billie.
" Oui ! Une négresse a une âme : qui cela n'étonne pas ? Une noire a une âme : c'est nouveau. Une NOIRE, avec une peau marron et une langue lilas. Une nègre d'amour qui chante la bouche pleine, pleine de lynchés. Une très grande noiraude brunâtre qui n'a pas sa langue dans la poche. Une femme négro-noire, une moricaude beige foncé qui fait des bulles de douleur quand on la pince. Une pute couverte de cirage, une reine en ébène vermoule qui sonne le glas avec sa luette orangée. Une impératrice ruisselante de chocolat chaud qui chasse les sons du temple de son palais. Une droguée très sombre qui se pique de tout souffrir. Une héroïnowomae aux yeux chaloupés dans les larmes, une terrifiante maîtresse d'abordage aux narines bordées de trésor. "
Et tout est ainsi !
Au siècle dernier, le monde allait à sa perte, il y est, alors musique :
à suivre
Phillippe Chauché
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