" Le corps de l'amour est un corps qui sauve, pensai-je, en tapotant de mon index le cadre du tableau que j'avais apporté, en me remémorant chacune des occasions où mon amour, et donc ma femme, m'avait sauvé de la détresse, en me rappelant ce rire et ce haussement d'épaules avec lesquels elle apaisait mon file chaque fois que je m'abandonnais à la misanthropie. Vous êtes, par exemple, à cette table du café Select qui est maintenant pour vous la table par excellence, vous étudiez le recueil de ce grand poète dont vous avez finalement réussi à dénicher une traduction correcte, pourtant vous n'avez ni le désir de lire ce grand poète ni la patience de le comprendre, et vous buvez avec dégoût ce thé fumé qui a toujours accompagné vos idées noires. Naturellement, vous n'attendez personne et, d'ailleurs, vous seriez fâché qu'il en soit autrement, car aujourd'hui vous ne désirez croiser aucun de ces amis ni aucune de ces femmes qui sont habituellement pour vous des occasions de vous réjouir, non, aujourd'hui, vous vous morfondez dans le jus crasse de votre dépression et vous ne désirez, de fait, que mélanger le goût de votre thé avec le goût de votre bile, pensai-je. " (1)
Suspendre cette lecture, le temps se dit-il, de commander non pas un thé fumé, il en avait horreur, mais un verre de vin blanc de grande lignée, puis la reprendre, non sans avoir au coeur, le corps libéré, le corps délivré, et cela se dit-il, passe aussi comme dans ce grand petit livre. Dehors le ciel était d'un bleu renversant, et les femmes qui traversaient la place pavée avec, il l'imaginait, se destinaient à illuminer le Temps. Il goûtait sa solitude, et en redemandait.
Il ne savait que penser du rendez-vous qu'elle venait de lui donner, le que faire viendra plus tard pensa-t-il, il se résolu toutefois à se rendre dans le café anglais, c'est ainsi qu'il aimait à l'appeler, où elle l'attendait sûrement, et comme il avait pris un peu de retard, il aggrava son cas et flâna dans les rues qui conduisait à la place ombragée où le fameux café allongeait sa terrasse. Il l'aperçût, et se dit, qu'une révélation allait peut-être en cet après-midi d'hiver éclater et vivifier en quelques secondes son regard.
à suivre
Philippe Chauché
(1) Grand Art / Valentin Retz / L'Infini / Gallimard
jeudi 26 février 2009
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Vous nous avez rarement habitué à ce genre de littérature, bien plaisante ceci dit en passant.
RépondreSupprimerMais franchement, avec un titre pareil "révélations" et ce qu'il s'en suit, vous ne faites qu'attiser notre curiosité au lieu de l'assouvir !
Il aurait pourtant été fort intéressant de savoir effectivement ce que cette femme lui voulait, si elle finit par "révéler" quelque chose d'important ou pas et connaitre les évènements qui en découlent !
Peut-être donnerez-vous une suite ? En tout cas, ça serait apprécié par une de vos fidèles lectrices !
Mais peut-être que vous ne souhaitez pas une littérature inutile en alignant des mots qui au final ne seront peut-être pas prononcés par cette mystérieuse femme. Je suppose que vous laissez "l'instant" décider de tout le reste ? M.