Man Ray |
" Le temps est la même chose que le désir. " (1)
Venant de passer quelques jours au centre même du déchirement du temps, écrit-il, sans autre consolation que la mémoire des mots et des noms, la main ouvrant de temps en temps le petit livre sur Nietzsche, l'oeil fixant le mouvement du temps, la neige sur les montagnes dans l'espace lointain du regard, son reflet que floutent les miroirs frappés eux aussi par ce déchirement, il a misé sur le retournement de ce déchirement, laissant filer un temps son corps - ses pensées - vers le désir de l'embrasement du temps, nous vivons car nous sommes inconsolables, lui a-t-il dit, il n'a su que répondre sur l'instant, plus tard, la phrase l'accompagnait encore lorsqu'il traversait la nuit à grande vitesse, il a pensé, nous vivons dans le désir d'être le mouvement du temps.
" Ce matin le ciel est sévère. Mes yeux le vident. Ou plutôt le déchirent. Nous nous comprenons, le vieux nuageux et moi, nous mesurons l'un l'autre, et nous pénétrons jusqu'à l'intérieur des os.
Nous entrepénétrant ainsi - loin et trop loin - nous nous subtilisons, nous anéantissons. Rien ne subsiste qui ne soit vide - néant comme est le blanc des yeux.
A l'instant où j'écris passe une jolie fille pauvre - saine, fragile. Et je l'imagine nue, la pénétrant - plus loin qu'elle même. " (1)
à suivre
Philppe Chauché
( 1) Journal in Sur Nietzsche / Georges Bataille / Gallimard / 1945
Pour saluer votre retour, la machine surréaliste (dont nous vous donnerons le secret) a écrit :
RépondreSupprimerBATAILLE (Georges), 1897 1962.
Ecrivain alarmant. Son oeuvre, épidémique, est centrée sur l'écroulement et le séisme de la mort; La peur intérieure ; La bactérie infectieuse maudite; Les Captivités d'Eros.
Curieusement nourri à la fois par l'idée du craquement et par celle de l'humour cataclysmal, Bataille fut un noyé apocalyptique.
Auteur de coups d'état aussi bien que de poèmes, parfois perçu comme terrible, finalement rangé dans le genre de la littérature d'éruption.
La consolation de la mémoire des noms est la délectation de l'impuissant à agir sur le Présent. Le présent que chacun pourrait faire de lui-même et qui, là, est refusé. Reste la dimension sociale comme un ersatz de présence.
RépondreSupprimerEt cette photo..... Quel cou!!!!!
RépondreSupprimerBelles remarques, anonymes sensualites, mais permettez-moi de préciser que la mémoire dont il est ici question, noms et corps, vérifie l'absence, même si Philippe le gnostique ouvre des champs - chants ? - autres, et transforme d'un trait de pensée le présent finissant en futur agissant - révélation de la résurection et l'inverse - adepte du présent vif et musical, je fais phrases les remarques du gnostique, et vous livre un secret : le soleil s'est couché comme la belle, son amant soldat vient de franchir la rivière, et les poèmes qu'il se récite l'accompagnent dans la nuit.
RépondreSupprimerBien à vous
Philippe Chauché
Cher Philippe Chauché
RépondreSupprimerIl est difficile de savoir à qui vous pensiez en écrivant :"anonymes sensualistes" ; à tout hasard, laissez-nous préciser que le deuxième commentaire ne peut, en aucun cas, nous être attribué : clairement, il n'est pas de nous.
Le premier est signé : il est de la machine surréaliste.
Ravis de votre retour : s'il y a une belle, "son amant soldat", qui "vient de franchir la rivière", et des poèmes qu'il se récite, vous savez que notre coeur est avec eux.
Bien à vous.
Je suis sensualiste, je suis surréaliste, je suis anonyme parmi les anonymes quitte à rester seul dans cette invisibilité. C'est la seule chose qui me rassure. Même ma compagnie m'inquiète. La preuve, quand d'aventure je me croise, j'en ai pour plus de trois jours: le choc, je me rassemble, je me fuis. Donc, je crois bien que je suis. Celui qui ne se nomme pas.
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