vendredi 24 mai 2013

L'Ange de Vienne



" Tout ce que nous voulions, c'était comprendre physiquement, par le jeu, par le son, à quoi pouvait ressembler la musique d'autrefois. Nous ne savions pas si vous étions dans le vrai mais nous étions certains que la manière dont on la jouait, à Vienne ou ailleurs, n'avait aucun rapport avec sa nature profonde... ce qui me mettait en colère, c'était les " machines à coudre " de Hindemith, des orchestres de chambre, des Musici di Roma... Ce n'est pas le jeu qui est authentique ou non, c'est l'artiste. Une partition peut être authentique ou non. Un interprète peut seulement être authentique dans son approche personnelle de cette partition. On peut dire : en jouant Purcell ou Ravel de cette manière, je suis authentique. Mais affirmer : cette manière de jouer Purcell ou Ravel est authentique, relève de l'imposture... Vienne n'est pas une ville, c'est une façon de voir le monde. Un équilibre fragile entre la vie et la mort qui se retrouve partout, dans la littérature, dans la peinture, dans l'Histoire, dans la rue... La légèreté de Mozart et de Johann Strauss est toujours teinte de cette insondable gravité, qui n'est pas tragique mais au contraire paisible. Apaisée par une mort désirable, inscrite dans les gènes de la cité et des citoyens... Expliquer n'est pas jouer. Quand vous jouez, vous cherchez le sens, l'expression, il y a du oui dans le non et du non dans le oui... Pendant deux siècles, les églises réformées étaient en lutte contre l'Église romaine, ce combat nous fécondait parce qu'il n'y avait pas de vainqueur, seulement des enjeux, des idées contradictoires. Avec le temps, l'Église catholique a  perdu son empire spirituel, la Réforme et ses corollaires politiques l'ont emporté. Sans retour ? Je ne sais pas. Je suis d'un naturel pessimiste. Mais un pessimiste qui espère. Soyons patients... "
( Nikolaus Harnoncourt - Ivan A. Alexandre - Diapason - n° 614 - juin 2013 )

L'ange de Vienne ou la nécessité de la beauté, la musique méritait ce musicien, cet artiste mérite de la musique.





à suivre

Philippe Chauché 

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