samedi 19 mars 2011

Visages du Roman (7)



" Il y a un siècle que je n'ai écrit, c'est que je suis très occupé. J'écris souvent des cinq à six heures de suite chez Z. Hier, chez le duc de Rovigo. Soirée très brillante. Sensation délicieuse, en arrivant, aux Nozze di Figaro, au moment de ce duo si voluptueux dans lequel le comte demande à sa femme la clef du cabinet où Suzanne vient de se renfermer. Mon coeur, ému par la contemplation de la belle gorge de Mme Lacuée et de la belle tête de Mme Pallavicini, boit avec avidité ces sons délicieux. Mes culottes blanches font beaucoup d'effet sur Mme Boucher, cette jolie figure qui fait trop d'impression sur moi. " (1)

" D'évidence ce journal, Roman absolu, doit être lu et relu ", c'est ce qu'il note à la page 1266 de cette nouvelle édition, juste en dessous de l'"Index des noms cités", éprouvé aussi, ajoute-t-il, il faut éprouver les livres, comme d'ailleurs les corps et les voix.

" Il me semble que mon bonheur physique avec Angéline m'a ôté beaucoup de mon imagination. I make that one or two every day, she five, six and sometimes neuf fois. " (2)

Pour contredire l'écrivain, il se dit, que le bonheur physique, qui lui arrivait de ressentir avec telle ou telle femme, ne réduisait en rien son imagination, il pensait même le contraire, ce bonheur physique - relatif d'ailleurs ! - lui en donnait plus qu'il n'en demandait, alors que les dites femmes, en demandaient toujours plus qu'il ne pouvait en donner, et souvent d'ailleurs alors qu'un éclat brillait dans leurs yeux, il les invitait " à passer à autre chose " ! " Et cela vous amuse ? ", lui avait-elle un soir demandé. " Tout autant que la gymnastique nocturne ! " Avait-il répondu, ce qui lui avait valu une volée d'insultes. Il pensa, que décidément, elle manquait d'imagination. Make that one...

à suivre

Philippe Chauché

(1) 27 novembre 1810 / Journal / Stendhal / Gallimard / Folio Classique / 2010
(2) 17 mars 1811 / d°

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