mardi 27 décembre 2011

Sensualistes Thang

Ngan-ki les reçut au Pong-laï, après trois jours de marche,  ils échangèrent leurs impressions sur la fertilité des trois royaumes et des jeunes filles, l'admiration  mutuelle qu'ils portaient aux fleurs de nénuphar, à l'immortalité des corps et la fragilité des mots.

" Quand les femmes de Yu-tien cueillaient des fleurs,
Jadis, elles disaient : ces fleurs nous ressemblent ;
Mais lorsqu'au matin la fiancée du palais des Han arriva d'Occident,
Il y eut, en Tartarie, beaucoup de belles filles qui moururent de honte.

Elles voyaient que parmi les belles filles, si nombreuses dans le pays des Han,
Il en est auxquelles nulle fleur de Tartarie ne saurait se comparer.
La beauté fut trahie par les portraits menteurs d'un peintre perfide.
Tandis qu'au fond d'un palais, Vou-yen vécut paisiblement.

De tout temps les charmantes filles ont eu cruellement à souffrir à l'envie,
Aussi les sables de la Tartarie reçurent-ils le beau corps de Tchao-Kiun. " (1)





Rien de plus doux que son regard
Rien de plus lumineux que cette fleur de nénuphar
Rien de plus nécessaire que notre silence
Quittons la montagne et armons notre arc.

à suivre

Philippe Chauché


(1) Li-Taï-Pé / Poésie de l'époque des Thang / traduc. du Marquis d'Hervey-Saint-Denys / Éditions Ivrea /  2007

2 commentaires:

  1. Tandis qu'il était tranquillement assis sur une plage de l'île de Bambou, à contempler le ciel – et attendant sa belle – Lin-Tsi vit arriver son assistant, visiblement essoufflé : « Votre stratagème est éventé ! » lui cria ce dernier.
    « Explique-toi ! » demanda Lin-Tsi.
    « J'étais là où nous avons laissé ce poème, prétendument de l'époque des Thang ; eh bien! le maître de l'endroit est un fin lettré, et il a cité le poème de Li-taï-pé qui évoque la belle Tchao-kiun : il connaît le recueil du marquis d'Hervey-Saint-Denys ! »
    « La belle Tchao-kiun qui dut sa perte à sa beauté, et de laquelle Tchang-kien a récemment écrit : "Cette belle jeune fille que ne purent racheter cent chameaux chargés d'or" ? » interrogea Lin-Tsi.
    « Celle-là même ! »
    « Aucune importance pour le recueil : préserver n'est pas tromper ! » dit Lin-Tsi.
    « Tout de même, pendant que j'y pense, cette idée que la beauté est une menace, est-ce une constante ! Et, pour ce qui est des sentiments, dans les temps troublés y a-t-il lieu d'y faire encore référence ? » demanda le moinillon.
    « Tandis que je descendais sur cette plage, je suis passé devant la maison d'un braconnier où j'ai entendu ceci à propos de la beauté : “Il faut dire aussi que la beauté est une menace, ce que savent les nymphes et les déesses.”; et cela, à propos des sentiments : “En lisant, nous nous apercevons que nous chuchotons parfois avec des femmes, vivantes ou mortes, souvent oubliées, qui ont aimé avec un élan qui nous touche – parfois nous accable – par sa pureté. ” .
    Il semble bien que, pour la beauté ainsi que pour les sentiments, il y ait une constante ! ; quant aux temps troublés, le vieux Tchieau-Ran a dit : " Qu'importe dès lors l'histoire ! Elle n'est pas le siège de l'être, elle en est l'absence, le non de toute chose, la rupture du vivant avec lui-même ; n'étant point pétris de la même substance qu'elle, il nous répugne de coopérer encore à ses convulsions. Libre à elle de nous écraser, elle atteindra nos apparences et nos impuretés seulement, ces restes de temps que nous traînons toujours, symboles des chaînes, marques d'indélivrance » répondit Lin-tsi.
    « Ce Tchieau-Ran, s'agit-il de celui que l'on appelait "l'Emil des soupentes" »
    « Celui-là même » répondit Lin-Tsi
    « Et la maison du braconnier, où était-elle ? » demanda encore le moinillon
    « À Pan Ham, ou quelque chose comme ça. »
    « À Pan Ham ! À Pan Ham ! Qui a jamais vu des braconniers à Pan Ham ! Cette fois, c'est vous qui avez été dupé ! » s'écria le moinillon, et il s'enfuit en riant et en se tapant sur les cuisses.

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  2. Tandis qu'il était en train de bodysurfer les vagues, Lin-tsi vit son assistant qui faisait des signes sur la plage ; il l'entendit, vaguement, qui lui criait : « J'ai vérifié pour Tchieau-Ran : la citation exacte est : "Qu'importe dès lors l'histoire ! Elle n'est pas le siège de l'être, elle en est l'absence, le non de toute chose, la rupture du vivant avec lui-même ; n'étant point pétris de la même substance qu'elle, il nous répugne de coopérer encore à ses convulsions. Libre à elle de nous écraser, elle atteindra nos apparences et nos impuretés seulement, ces restes de temps que nous traînons toujours, symboles d'échec, marques d'indélivrance" ! »
    « "Symboles des chaînes", "symboles d'échec" murmura-t-il,ça se tient. », et, tonitruant, il prit la plus belle de la journée...

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