" A chaque livre on assigne d'être le " produit agréé courant ", dont parlait déjà Mallarmé. D'où une amnésie, qui prive les êtres parlants du libre usage de leur tête et de leur souffle ; et donc qui les ampute de la vie la plus vivante. Mais d'un autre côté, au moment même où la parole est attaquée et avilie, réduite à son utilisation la plus étroite, il est possible de mettre en face de soi ce qui a pourtant l'air d'avoir disparu. On peut d'ailleurs reprendre le jeu de beaucoup plus loin, en accueillant dans chaque langue, par un dimanche de Pentecôte de la traduction, toutes les langues à partir du vide qui les sépare. Cette dernière précision afin d'exclure le nivelage du syncrétisme. Les " stocks d'études ", comme dit Rimbaud, ne demandent qu'à s'éclairer sans fin : à qui se tourne vers elles, les lumières du grec, de l'hébreu, de l'arabe, du chinois ou du sanscrit, en plus de celles qui étincellent du français, font jaillir leurs richesses, et ce ne sont pas des hallucinations ! "
Reprenant à son compte ces phrases tirées de l'Editorial de François Meyronnis et Yannick Haenel, il se dit qu'aujourd'hui trois revues s'imposent, s'il peut l'écrire, trois revues donc se démarquent de ce qui s'écrit et se pense ici ou là - Ligne de risque, Sprezzatura, L'Infini - où à chaque ligne le corps écrivant est un corps pensant et inversement, où un corps musical est souvent un corps peignant, pour y voir plus clair rien n'interdit, sauf dans le coeur de la domination, rien n'interdit donc de voir ce qu'en disent les kabalistes, les soufis, mais aussi la voie tantrique, la musique d'outre-vie et la liberté libre de la littérature.
En attendant la prochaine livraison de Ligne de risque qui ne saurait tarder, feuilleter sans illusion et loin de toute hallucination et de tout bavardage, ces Éclats divins II :
" L'être humain, dans la vision tantrique, et partie du cosmos. Il est pénétré, animé par les mêmes puissances, les mêmes divinités, qui sont à la fois dans et hors du cosmos et ont place dans son corps, qui est vécu cosmiquement. "
" ( Glenn Gould ) a désiré la perfection et il a pensé la trouver dans le montage, dans les micros, dans la technique, au coeur du contrôle et de la mesure. J'ai passé la main sur mon front, je sentais comme une fièvre qui montait, mes mains étaient froides et humides, je les serrais fort, tendue. " La perfection ne peut surgir qu'au coeur de l'instant ", voilà ce que j'ai pensé. Parce que l'instant n'est pas mesurable, qu'il est tout, et que le reste est une image, oui parce qu'il est tout ce qu'il y a. "
" Ce n'est, certes pas faute d'en avoir voulu sa part et de l'avoir su, comme toujours, avec un coup d'avance. Il l'écrivait dans l'I.S., dès 1958 : " Nous serons des " romantiques révolutionnaires ", au sens de Lefebvre, exactement dans la mesure de notre échec. "
L'échec ? Évidemment celui de la volonté et de ses espérances communautaires.
Sa mélancolie ? Celle d'un qui aurait préféré ne pas... "
" C'est toujours le langage qui va chercher une singularité, et qui lui attribue un destin, pas l'inverse. Une singularité est toujours dans une situation précise, déterminée par les circonstances,et soudain la parole la trouve. "
à suivre
Philippe Chauché