vendredi 3 avril 2009

Les Vertiges du Temps



Alors que les images " sans âme " poursuivent leur travail d'effroi, il est quelques vivants qui ici ou là, délivrent " la parole ". Pour s'en rendre compte il convient d'avoir en tête et en bouche toutes ces " paroles " qui ont " traversé le temps ", et qui par leur force, leur justesse, leur terrible et vivifiante présence ne sont pas autre chose que le Temps, à l'évidence il faut une fois toute avoir en tête que les livres sauvent, le curseur de l'histoire ne s'est jamais arrêté, leur tremblement présent en effraie plus d'un qui voudraient les remettre docilement à leur place, alors que leur présence aujourd'hui est une heureuse réalité.

" Il te faut avancer à tâtons en toi-même -
gratte le sol ! La terre a si peu livré ses secrets
que nul lait n'a encore jailli des tétons du poème. " (1)

" Les deux grands thèmes gnostiques - d'une part la connaissance et, d'autre part, la vie ou la résurrection - sont intimement liés dés le début du Livre de la Genèse. Il est intéressant, pour comprendre cette double importance et leur lien, d'évoquer leur intrication subtile. En plus des arbres au " bon goût ", figurent dans le jardin d'Eden deux arbres singuliers : l'arbre de la vie ainsi que l'arbre de la connaissance du bien et du mal. On croit connaître cette histoire sur le bout des doigts tant les Pères de l'Église - et en particulier Saint Augustin - ont glosé cette affaire. Pourtant, jeter un regard depuis l'herméneutique juive, change la perspective. D'abord, Dieu intime à Adam de manger de tous les arbres du jardin et ( il ne s'agit pas d'un mais ni d'un sauf ) de ne pas manger de l'arbre de la connaissance du bien et du mal. Nous avons donc en parallèle deux commandements qui semblent contradictoires. L'un est positif ( " tu mangeras " ), le second négatif ( " tu ne mangeras pas " ). Le judaïsme, dans l'élaboration de Loi, estime qu'un commandement positif domine un commandement négatif. Ainsi, Adam peut manger de l'arbre de la connaissance. Il est même contraint de le faire. De plus, ces deux arbres se trouvent au centre du jardin. Cet endroit ne possédant qu'un seul et unique centre, les deux arbres ne sont qu'un : connaissance et vie sont intimement liées. Le problème est la manière de manger de cet arbre. Si on le mange d'abord comme arbre de la connaissance, on devient mortel, ainsi qu'Adam le fait. C'est là que réside sa faute. S'il l'avait d'abord mangé comme arbre de vie puis comme arbre de la connaissance, il n'aurait jamais connu la mort. " (2)

" Il y a d'abord le Un, du Un émane le souffle, du souffle la pensée, de la pensée les plans, des plans les désignations, des désignations les tâches, des tâches les entreprises ; les entreprises appellent des contrats, les contrats établis, le moment opportun peut être fixé, des fruits peuvent en naître. La conjonction crée le moment, la conjonction des contrats crée les objectifs, la conjonction des objectifs apporte des résultats, l'accumulation des résultats entraîne la réussite ou l'échec, l'accumulation des succès et des échecs débouche sur la fortune ou l'infortune. L'ensemble de tous ces facteurs produit la victoire ou la défaite. C'est ainsi qu'il n'y a rien qui ne soit issu du souffle, parcouru par le principe constitutif, noué par les entreprises, régulé par le moment juste, soutenu par les dénominations, et accompli par les lois. " (3)

à suivre

Philippe Chauché

(1) L'EXODE / SUPER FLUMINA BABYLONIS / Le mal des fantômes / Benjamin Fondane / Verdier poche
(2) La Sagesse étrange des gnostiques / Sandrick Le Maguer / in Ligne de risque n° 24 / La sagesse qui vient / Février 2009
(3) Flux Circulaire / Le HO-KOUAN-TSEU / Précis de domination / par Le Maître à la crête de faisan / traduct. Jean Levi / Éditions Allia

1 commentaire:

  1. Cet article me fait repenser à la rencontre à laquelle j'ai assistée mercredi soir avec Charles Juliet. Justement, celui-ci parlait des lectures qui l'ont nourri. Il est agnostique, mais il a lu beaucoup les mystiques, parce qu'il y trouve comme il dit "exactement ce qu'il pense". D'époques différentes (parfois des dizaines de siècles les séparent), de religions, de cultures différentes, ils se rejoignent sur l'essentiel qui fait l'être humain, marchent sur les mêmes pistes et leur lecture nous aident à voir plus clair en nous-même.

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