samedi 6 décembre 2008
Prés du Fleuve
" Soleil superbe. Les feuilles de presque tous les arbres des Quiconces font masse sur le ciel. J'ai trouvé avec plaisir l'esplanade du grand café, à l'ombre du théâtre, pour brûler un cigare. En entrant au café pour prendre de l'extrait de chicorée, je trouve dans le Mémorial bordelais qu'il gèle, que tout le monde est en grand manteau, qu'aucune apparence de printemps ne vient encore réjouir la nature. Est-ce habitude de mentir d'un journal ministériel, ou désir d'employer des phrases toutes faites ?
Je vais voir un thermomètre qui est à l'ombre le long de la ligne des maisons, au midi de l'ancien emplacement du Château-Trompette ; il est à 11 degrés. Il y a bien là douze ou quinze maisons magnifiques et plus grandioses qu'à Paris. Il y a bien encore quelques consoles, quelques ornements avec guirlandes de fleurs ; c'est le genre ridicule de l'architecture de Louis XV. Le Capitole de Toulouse est bien couronné par une contrebasse !
Paris n'a rien de comparable à ce rang de maisons donnant sur un jardin immense, voyant à droite la Garonne, chargée de navires, et, au-delà, la colline de Lormont. J'apprends que les navires qui ont leur pavillon au haut du mât sont en partance. Les navires français sont près du pont, ce qui y a appelé le commerce de détail et jeté dans le fatal état de non à la mode ces belles maisons bâties sur le modèle de la place Vendôme. Les navires étrangers prennent place vis-à-vis des Chartrons ; de là, la plupart des riches négociants de Bordeaux habitent ce quai magnifique ou la superbe rue Pavés des Chartrons. " (1)
Rien n'est plus apaisant que le fleuve, j'y abandonne mon regard, saisi par ses reflets gris sombres, je ferme les yeux, et me laisse gagner par le sommeil.
" Je remonte le courant. Les mouettes ne disent rien, leur science des vents, des courants ascendants et des dépressions les invites au silence. Parfois, elles se sont curieuses et m'accompagnent du bec et de l'aile à travers les vitres des cafés et des chambres d'hôtels. Je souhaite être au calme, ma chambre donne sur ce puits de jour, ainsi la nuit les chouettes chevêches frôlent mon visage. Je pratique l'art aléatoire de la lecture en dormant. La ville m'accompagne et me livre ses secrets. Silence, je dors. "
à suivre
Philippe Chauché
(1)Stendhal / Bordeaux / Éditions Proverbe.
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Hein ?
RépondreSupprimerQuiconces quoi dont où ?
les reves de l'antiquité ne cessent jamais
RépondreSupprimerqu'importe le confort le luxe
les esprits sont asseptisés
toute pensée est entreprise farfelue
consommation, purification des ethnies
belle constatation
le monde a toujours été aussi beau
il n'a jamais changé
seul les hommes le font
depuis toujours les memes pousses de fleurs, adorent le soleil
et ce depuis la nuit des temps
alors l'on constate que le monde n'a jamais cessé d'etre ce qu'il était
seul le regard des hommes a changé