samedi 28 juin 2008

A Servir Très Frais

" On gagne la confiance de l'ennemi afin de le tranquilliser, tandis qu'en secret on complote sa perte. On n'agit que lorsque tous les préparatifs sont achevés de peur qu'il ne change de dispositions : " La dureté se cache sous la douceur. " (1)

" Le mauvais torero, comme tout mauvais artiste, confond l'art et la stratégie, l'exactitude et l'opportunité. " (2)

" On cesse d'être jeune au moment où l'on ne choisit plus ses ennemis, où l'on se contente de ceux qu'on a sous la main. " (3)

" Le chanvre ne renverse pas de façon spectaculaire et brutale comme la mescaline, il agit traîtreusement, selon son style propre qui a quelque chose de factice et de mystificateur. " (4)

" Prochain stade du gnangnan : une Déclaration universelle des Désirs de l'Homme et du Citoyen. " (5)

" ll est étonnant de voir dans le coeur de certaines femmes quelque chose de plus vif et de plus fort que l'amour pour les hommes, je veux dire l'ambition et le jeu : de telles femmes rendent les hommes chastes ; elles n'ont de leur sexe que les habits. " (6)

Il convient tout d'abord de posséder un poulet d'un bon kilo, quelques olives noires bien grasses et dénoyautées, un récent prix Goncourt dont on aura préalablement enlevé les arrêtes, des amandes en poudre, deux ou trois oignons frais, de l'ail, un peu de bouillon de poule ou de culture, de l'huile d'olive de l'année, du sel, une ou deux poignée de gnangnan et de chichi, du poivre et quelques épices de votre choix, seule condition qu'elles étonnent votre palais sans le brûler.

Commencez par hacher l'ail et l'oignon, côte à côte vous les faites revenir dans un faitout avec un peu d'huile d'olive, pendant qu'ils se retournent et perdent leur blanche couleur, coupez votre poulet, après l'avoir abattu d'un coup de fusil, en morceaux pas trop gros, ni trop petit, enfin c'est comme vous le souhaitez, n'oubliez quand même pas de le plumer, car la plume attache ! Tout se mélange à loisir, puis ajoutez votre récent prix Goncourt, du sel, du poivre, les amandes, et les épices citées plus haut.

Vous avez maintenant quarante minutes à consacrer à : votre maîtresse, votre femme, la dernière conquête de la nuit, vos enfants, votre testament, votre rasage matinal - si vous vous mettez en cuisine le matin -, ce dernier roman que vous n'avez pas terminé, repasser vos chemises blanches, cirer vos chaussures en cuir noir, rédiger une recette stupide sur votre blog. Mais attention dix minutes avant la fin de la cuisson, jetez dans le faitout les olives noires, et patientez un peu.

Si cette recette ne plaît pas changez d'adresse, coupez votre téléphone, ouvrez le gaz, ou recommencez en remplaçant le poulet par un chevreau vivant.

à suivre et bon appétit

Philippe Chauché

(1) Les 36 Stratagèmes / Manuel secret de l'art de la guerre / Rivages poche

(2) José Bergamin / L'art du Birlibirloque / traduc. Marie-Amélie Sarrailh / Le temps qu'il fait

(3) Cioran / Syllogismes de l'amertume / Gallimard

(4) Henri Michaux / L'infini turbulent / Mercure de France

(5) Frédéric Schiffter / Traité du cafard / finitude

(6) La Bruyère / Les Caractères / Garnier

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