" Les poètes n'ont (donc) pas eu raison de nous dépeindre l'amour comme un aveugle ; il faut lui ôter son bandeau, et lui rendre désormais la jouissance de ses yeux. " (1)
" Accuse-moi de tout : j'ai négligé
Tout ce qui eût payé tes grands mérites,
J'ai oublié d'attester ton amour
Auquel jour après jour rien n'est qui ne m'attache.
J'ai fréquenté de douteux inconnus,
J'ai gaspillé tes droits coûteusement acquis,
J'ai déployé ma voile à tous les vents
Qui pouvaient me porter le plus loin de toi.
Note donc mes écarts, prémédités,
Redouble l'évidence par le soupçon,
Traîne-moi sous le feu de ta colère,
Soit ! Mais ne tire pas sur moi, ne me hais pas !
Puisque, c'est ma défense, je ne voulais, bien fort,
Qu'éprouver la constance de ton amour. (2)
" N'aimer uniquement que ce qui t'arrive et ce qui constitue la trame de ta vie.
Est-il rien, en effet, qui te convienne mieux ? " (3)
On disait de lui, qu'il était doué pour la vie, que tout lui réussissait, qu'il écrivait dans une allégresse permanente, dans un élan gracieux, tout ce qu'il touchait disait-on se transformait en or, on aimait sa compagnie, sa présence, cette tension du verbe et ses abandons du corps, il était traversé par le temps, il s'en était fait, aimait-on rappeler, un confident, on le croisait silencieux, et jamais personne n'osait le déranger, on l'aimait pour ses lyriques envolées, où ses mots flottaient dans l'espace pour s'épanouir en bouquets luxuriants lorsqu'ils retombaient dans les oreilles expertes de ses amies. Personne ne se serait autorisé à lui demander ce qu'il pensait de l'amour, il n'aurait d'ailleurs pas répondu à une telle question. Un jour, alors que la nuit s'était installé et qu'il allait souffler ses dernières bougies, il demanda son nécessaire à écriture, et traça d'une main encore leste, ces mots, qu'il souhaita que l'on inscrive sur la pierre qui le protégeait des dernières tentations diaboliques :
" Il aura à chaque instant vécu dans l'amour, sans peur, sans pleur, sans doute, mais dans la sérénité du vide. "
Que mille tulipes s'épanouissent dans ton regard.
à suivre
Philippe Chauché
(1) Discours sur les passions de l'amour / Pascal / Oeuvres / La Pléiade / 1936
(2) Sonnets / W. Schakesperare / traduc Yves Bonnefoy / Poésie / Gallimard
(3) Pensées pour moi-même / Marc-Aurèle / traduc Mario Meunier / Garnier-Flammarion
samedi 26 avril 2008
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